- Colonel Francesco Amoros - Fondateur de la gymnastique en France.
- Napoléon Laisné.
- Dr Philippe Tissié - P. H. Ling.
- Georges Demenÿ.
- Georges Hébert.
- L'esprit de Joinville.
L'ÉCOLE MILITAIRE de JOINVILLE
1838 : Fermeture du Gymnase Normal Militaire et Civil du colonel Francesco Amoros, ouvert à Grenelle en 1819.
« Notre méthode s’arrête où le funambulisme commence... »
Don Francisco Amoros y Ondeano, Marquis de Sotelo, naît à Valence en 1770 ; issu d'une famille dont la noblesse remonte au 16e siècle, il poursuit la carrière des armes, comme plusieurs de ses ancêtres. Exilé en France après la guerre d’Espagne, il devient directeur du gymnase normal militaire et civil, du gymnase spécial des sapeurs-pompiers de la ville de Paris et enseigne dans plusieurs établissements privés.
Promoteur de l'éducation physique en France, sa gymnastique s’inspire de la méthode du Suisse Pestalozzi, base de la pédagogie moderne, ainsi que de l’ouvrage de Giovanni Borelli écrit en 1679 : « De Motu Animalium ». Les exercices d’Amoros formeront plus tard, l’essentiel des classements de la méthode naturelle de Georges Hébert.
« La gymnastique est la science raisonnée de nos mouvements, de leurs rapports avec nos sens, notre intelligence, nos sentiments, nos mœurs et le développement de nos facultés. Elle comprend la pratique de tous les exercices qui tendent à nous rendre plus courageux, plus intrépides, plus forts, plus, industrieux, plus adroits, plus véloces plus souples, ou plus agiles, et qui nous disposent à rendre des services signalés à l’Etat et à l’humanité…
Elle permet le prolongement de la vie, l’amélioration de l’espèce humaine, l’augmentation de la force et de la richesse individuelle et publique, sont ses résultats positifs. » 1820
Très actif, il rédige de nombreux ouvrages, prononce des discours, écrit des mémoires sur l’instruction élémentaire, la mendicité, les épidémies de fièvre jaune les maladies de la nutrition… Il publie un « Rapport sur le gymnase normal, militaire et civil » ainsi que des « Cantiques religieux et moraux, ou la Morale en chansons ; à l'usage des enfants ». Son ouvrage de référence restant le : « Manuel d’éducation physique, gymnastique et morale. » publié en 1830.
« …Soit en Espagne soit en France, j'ai eu un grand soin de bannir de mes exercices tout ce qui peut sentir la planche et le funambulisme des boulevards... J'ai évité enfin ce charlatanisme qui rend ridicule les choses les plus respectables. On observera dans ma méthode une grande profusion d'images pour mieux en faire comprendre les préceptes… »
1848 : 10 décembre : Louis Napoléon Bonaparte, devient président la République, avant de fomenter son Coup d’État, le 2 décembre 1851.
L’Armée comprend l’intérêt de la gymnastique pour la préparation physique du soldat, mais constate l’absence de structures et de cadres :
" Il fallait donc, puisque la gymnastique et l'escrime sont enseignées dans l'armée, qu'il existât un conservatoire ou vinssent se former les instructeurs, pour que l'enseignement demeurât identique et immuable et ne risquât point de varier suivant les fantaisies de chacun".
1852 : L’École Normale Militaire de Gymnastique de Joinville ouvre ses portes le 15 juillet, à la Redoute de la Faisanderie (bois de Vincennes), sous la direction du commandant Louis d’Argy assisté de Napoléon Laisné. Elle a pour but de former des cadres sportifs pour les armées. Elle sera la première véritable école de formation sportive, créée en France.
Sur les traces de Pestalozzi et Amoros, dont il fut l’élève puis le collaborateur, Napoléon-Alexandre Laisné (1810-1896), fut inspecteur puis directeur des gymnases de la ville de Paris, ainsi que professeur de gymnastique de Polytechnique et du lycée Louis le Grand.
Il deviendra le fondateur de la « Gymnastique Médicale » dans les hôpitaux de Paris : Salpétrière, Hôpital des enfants malades, Institut de sourds et muets, d’aveugles…
L’École de Joinville assure pendant 80 ans, la formation de moniteurs pour les écoles militaires, puis civiles ; elle constituera l’essentiel de la méthode naturelle d’Hébert, qui produira l’EPS française.
L’École de Joinville sera le berceau du sport contemporain. Elle se trouvera à la pointe de la recherche scientifique sportive, lieu d’entraînement et de mise au point pour les champions. Carrefour d’échanges et d’idées, elle inspirera la plume d’auteurs célèbres, assurant le développement d’un journalisme spécialisé, afin d’offrir au sport, son audience, sa popularité, pour aboutir à la dimension planétaire d’aujourd’hui.
Le 2 décembre, Louis-Napoléon Bonaparte devient Napoléon 3. Sous le second Empire, la réputation de l’école devient importante ; le succès considérable de ses fêtes annuelles, en présence du président et des plus hautes personnalités civiles et militaires, en témoigne.
1870 : Siège de Paris par les Prussiens.
1872 : Après son occupation de 70-71, aggravée des sanglants affrontements de la Commune, l’École de Joinville prend le nom d'École Normale de Gymnastique et d’Escrime ; un parfum de « revanche » accompagne la formation des moniteurs…
L’Ecole connaît une forte activité, mais aucune des variations sur le thème de la pédagogie n'existe. On se base sur le plus fort : il faut suivre et subir !
« Ce que j'ai vu dans la séance de gymnastique à l'école militaire de Joinville n'a fait que confirmer les critiques adressées à la méthode française. À Joinville, les faibles sont sacrifiés aux forts, j'ai compris pourquoi plusieurs anciens élèves de Joinville m'ont dit avoir craché le sang au cours de leur entraînement intensif…
Peu ou pas de méthode scientifique ; beaucoup de poudre aux yeux… Tous les élèves moniteurs ne pratiquent pas les exercices aux agrès, les artilleurs et les escrimeurs en sont dispensés… Il en est autrement à Stockholm où les élèves moniteurs s'entraînent à la fois aux exercices aux agrès, à l'escrime, à l'épée, au fleuret, au sabre et à la baïonnette.
À l’escrime, ils tirent alternativement avec les 2 mains ! » P. Tissié
Dr Philippe Tissié P. H. Ling
Philippe-Auguste Tissié (1852-1935), représente le courant hygiénique qui oppose la santé à l’exploit sportif. Il s’intéresse aux théories de Ling (méthode suédoise), avant de développer ses propres principes de gymnastique. Il est partisan d’un sport rationnellement contrôlé.
Entre 1890 et 1903, Le Dr Philippe Tissié organise dans le sud-ouest, des lendits (joutes scolaires), réunissant des centaines d'écoliers et d'instituteurs; ils inspirent quelque méfiance aux autorités. Ces rassemblements festifs organisés en plein air, donnent lieu à de vastes représentations de mouvements d'ensemble et de jeux.
À l’origine, le lendit était une grande foire médiévale installée au nord de Paris, près de Saint-Denis, interdite aux « escholiers », qui venaient y semer le désordre !
À Bordeaux, les 11 et 12 mai 1890, le Dr Tissé organise son 1er lendit : Le programme comporte de l’équitation en manège, de la boxe, du chausson, du vélocipède et du canotage sur la Garonne… mais également de la Canne et le Bâton, inspiré de la technique de Joinville.
« Dans les exercices d’ensemble, comme le Bâton, ou la boxe, l’élève suit la cadence, compte en lui-même et surveille ses camarades pour faire coïncider ses mouvements avec les leurs… » 1897 La fatigue et l’entraînement physique
1902 : Création du laboratoire de physiologie de l'École de Joinville confié à Georges Demenÿ (1850-1917); il est considéré comme le fondateur de l’éducation physique scientifique. Demenÿ fréquente le gymnase d'Hippolyte Triat, précurseur du culturisme avant de devenir moniteur de gymnastique à « La Nationale ».
Soucieux de retrouver les proportions des athlètes antiques, il entreprend des études de physiologie à la Faculté de médecine de Paris, tout en suivant des cours de mathématiques à la Sorbonne; il entre également au Conservatoire de musique avant de devenir violoniste à l’Opéra.
Son invention du Chronophotographe (avec Étienne-Jules Marey) dans les années 1890, fait de lui un des précurseurs du cinéma…
Homme donnant un coup de Bâton - 1892
Demenÿ préconise une gymnastique fonctionnelle avec une grande autonomie de choix à l’éducateur. Son influence sera très importante sur la « Méthode naturelle » de Georges Hébert. Par ses ouvrages et ses recherches, il a complètement renouvelé l’approche de la gymnastique.
Il publie de nombreux ouvrages… Son livre : « Mécanisme et éducation des mouvements » (1902), définit les bases scientifiques de l’éducation physique.
1918 : Les allemands incendient les archives militaires de Joinville. L'école reprend ses missions, devenant également un centre de préparation pour les athlètes qui s'entraînent en vue des compétitions internationales.
1925 : L’École de Joinville devient Ecole Supérieure d’Education Physique.
1933 : Création de l'Ecole Normale d'Education Physique (ENEP) ; l’influence des militaires et de l’école de Joinville, disparaît progressivement au profit des médecins dans le contexte de l’éducation physique scolaire.
1939 : L'École de Joinville ferme ses portes. C'est la fin d'une époque et de la "Méthode Française". Ses anciens cadres reprennent progressivement ses activités dès 1941, dans les établissements civils et militaires... Antibes, Pau, L'I.N.S et le bataillon de Joinville.
1940 : Les allemands pillent les archives militaires de Joinville.
1945 : Création de l’Institut national des Sports (l’I.N.S), dédié à l'enseignement, le perfectionnement ainsi que de l'entraînement des athlètes et cadres sportifs.
1956 : Création du célèbre Bataillon de Joinville, que fréquenteront 21 000 sportifs de haut niveau, dans un contexte de circonscription exceptionnelle. Ce dispositif contribuera aux succès internationaux de nos athlètes.
1957 : Mort de Georges Hébert, promoteur d’une méthode d’éducation physique naturelle, « L’Hébertisme » (1912-1939), opposée à la Gymnastique suédoise et la spécialisation sportive.
Il dénonce les séances de gymnastique, ennuyeuses et monotone qui se déroulent en intérieur où l’on y répète, tout habillé, les mêmes mouvements inspirés de la gymnastique suédoise :
« C’est l’exercice du pantin sur place durant lequel les hommes ressemblent à des sémaphores… »
Il pose les premières bases de sa « méthode naturelle », répertoriant les gestes naturels qu’il classe en 10 catégories : marche, course, sauts, grimper, quadrupédie, équilibrisme, lever et porter, les lancers, la défense naturelle et la natation, afin de développer l’endurance, la résistance, la force, la souplesse et la coordination.
1901-1902 : Suite à l’irruption de la montagne Pelée, et la destruction de Saint Pierre de la Martinique, il assure avec ses hommes embarqués à bord du « D’Estrées », le sauvetage de 700 personnes.
Marqué par ce drame, il adresse un rapport à l’état-major de la Marine, dans lequel il exprime son désir de former des hommes forts, physiquement et moralement selon les principes de sa méthode, avec pour devise :
« Être fort pour être utile ! ».
L'ESPRIT DE JOINVILLE
L'esprit de Joinville, c'est la volonté :
- D'oeuvrer en faveur de la promotion de toute activité physique ou sportive.
- De contribuer à donner à la France les meilleurs spécialistes dans le domaine sportif.
- De propager le rayonnement des valeurs morales.
- De rechercher et pratiquer toute forme d'exercices physiques dans des soucis de santé, d'efficacité et d'excellence.
- De participer à l'épanouissement de chaque individu selon ses capacités, dans un esprit de citoyenneté.
- De concevoir la performance dans la plus grande tradition de l'honneur.
- De développer un esprit de camaraderie, d'entraide et de loyauté.
- De servir d'exemple en toute circonstance, particulièrement vis-à-vis de la jeunesse.
L’École de Joinville, c’était l’apprentissage de la pédagogie, la recherche de la perfection et de l’harmonie gestuelle, le goût de l’effort et de la performance dans le dépassement de soi.