LES FRÈRES LECOUR
" Les professeurs de Paris sont à peu près les seuls dépositaires, des secrets de cet art. Les 2 Lecour ne suffisent pas à l’affluence de leurs élèves, soit en ville, soit dans les salles : les lundi, mercredi et vendredi, il y a séance au passage des Panoramas ; les mardi, jeudi et samedi, ils enseignent rue de Tournon ou se presse la foule des étudiants."
« Le spectacle a commencé par un assaut de Canne entre Lecour et son frère. Le public a été émerveillé de cette rapidité inouïe, de cette dextérité sans égale, de ces attaques et de ces ripostes promptes comme l’éclair ; et il a compris qu’entre les doigts des frères Lecour, la Canne valait l’épée de Saint-Georges. Chapeaux bas ! Messieurs, s'il vous plaît !»
Théophile Gautier
CHARLES LECOUR (1808-1894)
« Les individus naissent en harmonie avec leur temps. Si les grandes époques manquent parfois aux hommes il est bien rare que les hommes manquent aux grandes époques : un homme ou un génie apparut. Cet homme c’est Charles Lecour ! » A. Dumas
Né dans le village d'Oissery près de Meaux, Charles Lecour découvre la savate à 16 ans chez Michel dit Pisseux. Il étudie également, la Canne et le Bâton chez un professeur venu de Rouen, Louis Leboucher. Ses progrès sont rapides; il ouvre une première salle, rue du Faubourg-Montmartre en 1830. Il transforme la savate "violente" de son ancien professeur, la vide de ses coups dangereux et la rebaptise « chausson ».
Avec son frère Hubert, il ouvre d'autres salles, dont celle du Passage des Panoramas, pour une clientèle aisée… Eugène Sue, Nestor Roqueplan, les marquis de Noailles, de Dreux-Brézé, les comtes de Clary, de la Rochefoucauld, de Niewkerke, de Boisgelin, Vigier, le duc de Mouchy, le baron Gourgaud...
Il "professait" également en ville, chez lord Seymour, rue Taitbout et chez l'écrivain et directeur du "Figaro", Alphonse Karr, dans son pavillon de la Tour d'Auvergne. Théophile Gautier assistait aux leçons en tenue truculente, un bonnet à glands d'or posé sur des longs cheveux.
Vers 1840, Charles Lecour associe boxe anglaise et chausson… Il « invente »… la future « boxe française » ! Mais c’est une autre histoire…
1842 : Eugène Sue dans son roman : "Les Mystères de Paris", citera Charles Lecour et sa méthode enseignée au Prince Rodolphe : "les terribles coups de la fin".
HUBERT LECOUR (1820-1871)
Hubert, tireur distingué, succède à son frère en 1848. Il enseigne principalement la Canne, Passage des Panoramas, rue de Tournon et rue de l'Arbre Sec à Paris.
« C'est pour la Canne comme pour la Boxe, il a simplifié partout; on peut se battre dans un corridor. Son jeu se résume en deux mots: précision, vitesse. Je crois pouvoir dire qu’ Hubert Lecour, sous ce rapport, n'a jamais été dépassé » J. Vallès
« Hubert Lecour est un homme de manières aimables, très poli, courtois, à la figure empreinte à la fois de douceur et d'énergie, il a, quand il s'anime, le regard dur, la face terrible, mais son accent est doux, son geste aussi engageant dans le repos, que redoutable dans le combat. En un mot, c'est un parfait gentleman ! » Jules Vallès - 1865
Épris de musique, il invente le concept des "assauts-concerts" de la salle Richelieu; sur scène on applaudit les voltiges à la Canne, entre deux chansons en vogue, assauts de boxe et combats de lutte; ce type de spectacle novateur fait se déplacer et courir le "Tout-Paris" de l'époque. Hubert fut le premier à "sentir" la Canne comme un art élégant, raffiné, sans exclure son extraordinaire efficacité.
"Il faut voir la petite salle du passage des Panoramas, encombrée d'élèves à l'heure des démonstrations d’Hubert Lecour... le spectacle offre un aspect fantastique ! C'est un tel mouvement de Cannes et de Bâtons hachant l'air, que le jour y perd de son éclat ! ... Ici ce sont des voltiges, là ce sont les des "fouettés", plus loin, c'est la "Rose Couverte" qui s'exécute, par laquelle le Bâtonniste se crée une sorte de défense impénétrable. La dextérité et la souplesse françaises apparaissent dans ces exercices avec avantage." E. Chapus 1854
" La représentation s'est achevée par un exercice au Bâton à deux par les frères Lecour. Ô brave caporal Trimm ! Qui te figurais avoir tracé en l'air une arabesque bien compliquée avec le bout de ta Canne, que tu serais humilié et ravi en voyant le Bâton de M. Lecour faire des huit, des seize et des lacs à désespérer les plafonneurs de l'Alhambra !"
Théophile Gautier